Les nazis à table

C'est un fait méconnu : une fois au pouvoir, le régime nazi a fait de la question alimentaire une priorité. À la suite du blocus anglais à la fin de la Première Guerre mondiale, le traumatisme de la famine hante l'inconscient collectif allemand. Dès lors, l'idée d'avoir de quoi se nourrir a certainement motivé l'expansion territoriale, donc la guerre. Et si l'éradication des Juifs d'Europe trouvait sa cause dans la volonté de réduire le nombre de bouches " inutiles "... ?
Dans l'objectif fou de construire un homme nouveau, aryen, en bonne santé, les nazis ont " purifié " la table. Prônant une cuisine nationale-socialiste avec des produits locaux, ils sont parmi les premiers à développer une agriculture biologique ! Hitler lui-même devient végétarien. Lutte contre le tabac et l'alcool, recherches massives sur la nutrition et le nombre de calories nécessaires par individu, expérimentations sur les aliments de substitution dans les camps de la mort... Le corps particulier, comme le corps collectif, doit être contrôlé et débarrassé de toute " souillure ".
À travers la nourriture, les nazis établissent également un schéma social selon lequel les femmes sont chargées des repas, la cuisine représente la place centrale de la maison, la famille se réunit autour du ragoût du dimanche... À une fonction sanitaire s'ajoute ainsi une fonction communautaire.
En creusant de manière inédite et très documentée ce sujet de l'alimentation sous le IIIe Reich, Les Nazis à table propose un regard neuf et passionnant sur ces années sombres. Il désigne aussi, en filigrane, l'étrange héritage que nous avons gardé d'un des régimes les plus meurtriers de l'Histoire.